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C'est combien la place ? 

Clara CHOPARD, Niléane DORFFER & Axelle MICHEL

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CHOPARD Clara, Niléane DORFFER, MICHEL Axelle. C’est combien la place ? « Formes sensibles et politiques de l’habiter », Master 1 Design Urbain, IUGA. 5 min 18 sec. Couleur, sonore, décembre 2018.

« C’est combien la place ? » est un court métrage réalisé sur la place Grenette, située dans la Grande Rue au centre-ville de Grenoble. Elle constitue un carrefour entre la place Victor Hugo, la place Notre-Dame, le Jardin de Ville et l’Office de Tourisme. Prévue dans un premier temps pour la circulation automobile, elle est devenue une zone piétonne. Suite au visionnage du film de William H. WHYTE, nous avons porté notre regard sur les assises de cette place. Or la majeure partie de celles-ci sont des terrasses privatisées. Les nombreuses boutiques et restaurants de la place ont installé des terrasses en extension de leur échoppe sur une part importante de l’espace. La controverse qui en découle interroge le débordement de l’espace privé sur l’espace public, et donc la gratuité de l’espace public.

 

Pour réaliser ce film nous nous sommes rendues sur le site à des temporalités différentes : de jour, de nuit, la semaine, le weekend, le matin, l’après-midi. Notre objectif était de mettre en évidence l’occupation des terrasses et leur influence sur la dynamique de la place. La place Grenette est un lieu de passage ; beaucoup d’enquêtés nous ont confié y passer souvent mais ne pas s’y arrêter. Par différents cadrages, nous mettons en évidence les rythmiques de l’espace. Par exemple, les plans larges nous permettent de distinguer les instants de vide et de plein. Les plans plus rapprochés servent à mettre en lumière la prégnance des vitrines commerciales sur le pourtour. Une partie importante du film est tournée en extérieur mais quelques plans dans des cafés sont insérés afin d’accentuer l’impression de flou entre espace public et espace privé. Le court métrage met en scène l’ambiance sonore de la place, près de la fontaine, près des terrasses pleines, près des magasins, dans un café, etc. Des commentaires de passants appuient la controverse.

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Lors de notre restitution, nous avons animé quatre tables-rondes. Le court métrage a été présenté à vingt-trois étudiants de filières et niveaux différents. À la fin du visionnage, nous proposions de réaliser des cartes mentales. Par l’utilisation de feutres et crayons, ils ont dessiné la place, ses accès, ses magasins, ses terrasses et tout autre détail leur paraissant marquant. Cette démarche a permis d’engager la discussion et le débat, chaque invité ajoutant des éléments au fur et à mesure des schématisations. Ces cartes résultent des perceptions individuelles et collectives. Elles permettent d’entrevoir des déformations de l’espace liées aux représentations. Tout au long des échanges, nous prenions des notes pour garder les traces des éléments de débat en complément des réalisations graphiques. Pour ne pas créer de barrière avec nos interlocuteurs en étant « caché » derrière un ordinateur, ces notes ont été prises manuellement.

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La question de la privatisation de l’espace public a été perçue par nos interlocuteurs. Le dialogue s’est engagé facilement, souvent sans que nous ayons à prendre la parole. Dans un premier temps, les retours d’expérience propre à chaque individu sur la place Grenette émergent. Les invités témoignent d’un sentiment, d’un contact quotidien, d’une découverte et parfois d’un souvenir. Par la suite, les représentations collectives tendent à identifier la place Grenette comme une référence, un symbole de l’identité grenobloise tout comme la Bastille ou le Jardin de Ville. Les échanges ne donnent pas lieu à de réels dissensus ; les invités semblent s’accorder sur la forte prégnance de l’espace privé sur l’espace public. Toutefois des divergences s’opèrent au sein des discours personnels. Certain identifie cette place comme un lieu très agréable mais ne la fréquente pas pour autant : « J’aime trop cette place, j’y passe tout le temps pour aller à Notre-Dame ».

Les échanges dépassent le questionnement du rapport public/privé d’une place réservée au passage et aux terrasses de cafés pour aboutir à une redéfinition de ce qui fait place : « Qu’est- ce qu’une place ? », « Qu’est-ce qui fait place ? ».

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De ces questions sont nés des débats et des évolutions du discours. Au départ, les avis étaient plutôt mitigés. Ils décrivent la place comme un espace non convivial, qui « ne donne pas envie ». Par la suite, le discours évolue de façon positive « C’est rassurant parce qu’il y a toujours du monde », « Elle [la place] me dérange pas, y a une bonne ambiance de jour comme de nuit », et sarcastique « ça fait une pause pour ceux qui font du shopping. De toute façon ils ont déjà dépensé beaucoup alors 10 euros de plus ou de moins… ».

Toutes ces remarques donnaient lieu à des débats dont voici quelques exemples :

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« Il en faut pour tous les goûts dans un centre-ville. 

- Oui mais c’est un espace public donc tout le monde devrait pouvoir y aller et le problème c’est que, vu le tarif des cafés, c’est fait pour des consommateurs de luxe, donc pas tout le monde. »

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« Pourquoi les commerces ont le droit de s’installer comme ça ?

- Parce qu’ils payent !

- oui, mais au détriment des autres qui pourraient utiliser la place. »

 

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